À Dieu, Pape François
Le pape François a rejoint le Père le lendemain de la fête de Pâques, après avoir une dernière fois invité à la joie et à l’espérance les foules de fidèles qu’il aimait tant rencontrer et réconforter. Comme pour les apôtres après la résurrection, nous sommes entrés dans le temps de la mémoire et de l’action de grâce pour les bienfaits reçus durant ce pontificat. Comme eux, il nous faudra aussi sans doute du temps pour bien prendre la mesure de l’héritage reçu et de la mission à laquelle il nous convoque. Il est pourtant déjà possible de dire quelques messages que le pape nous a légués, pour le monde, pour l’Église et plus particulièrement pour les universités catholiques : la joie de la miséricorde, la nécessité du dialogue, la conversion à la fraternité.
Ce pape nous a d’abord invités à entrer dans la joie de l’Évangile et à devenir disciples de Jésus pour annoncer cette bonne nouvelle au monde. Cette joie vient de la prise de conscience de la miséricorde de Dieu à notre égard. Pour François, c’est le centre de la Révélation, le cœur battant de l’Évangile, le témoignage premier auquel l’Église est invitée. Pour la pastorale de l’Église, il s’agit d’adopter le regard miséricordieux du Christ, à prendre en compte la réalité souvent douloureuse des personnes rencontrées pour les accompagner, les aider. Pour les formateurs et les théologiens que nous sommes, c’est une confirmation dans le désir d’accompagner chacun des étudiants sur son chemin propre et de faire de la théologie à partir de l’expérience, en particulier celle des petits, ceux que Dieu vient rejoindre en premier.
L’appel à explorer les voies du dialogue que le pape François n’a pas cessé de rappeler est aussi particulièrement pertinent pour la vie de l’Église et la mission des facultés. Ce dialogue, il l’a pratiqué avec les autres confessions chrétiennes, avec les autres religions. Dans bien des textes, il a placé le dialogue à tous les niveaux (avec les sciences, avec les populations, entre les nations …), comme une condition essentielle pour résoudre les graves questions de la sauvegarde de la maison commune, de la lutte contre la pauvreté, de la crise des migrations. Sans omettre bien sûr le dialogue au sein d’une Église appelée à marcher ensemble (de manière synodale) à l’écoute de l’Esprit pour affronter les défis actuels. Il a ainsi invité à faire de nos facultés des lieux de rencontre des disciplines et nous a confortés à poursuivre et développer la conversation entre philosophie, théologie et sciences humaines, à favoriser une formation qui allie tous les états de vie.
Dans tous ces domaines, le pape François nous a bousculés et appelés à la conversion (missionnaire, écologique, sociale…) pour changer de regard, inventer d’autres paradigmes culturels, trouver de nouvelles manières de faire afin de construire la fraternité. Ses gestes et ses messages ont été portés par une expérience spirituelle, alimentée par la tradition ignatienne, la pratique du discernement et la contemplation du cœur brûlant du Christ. L’amour des autres est inséparable de l’amour de Dieu. La fraternité suppose de se reconnaître fils et filles d’un Père aimant. François nous rappelle ainsi l’importance d’enraciner notre réflexion universitaire dans une tradition et une expérience spirituelles, à mettre de la profondeur mystique dans nos recherches intellectuelles.
Miséricorde, dialogue et conversion fraternelle sont trois messages que le pape François nous a légués pour préparer l’avenir, en particulier dans la formation de ceux et celles qui sont appelés à être les acteurs de la société et de l’Église. Nous rendons grâce à Dieu et nous confions à Dieu ce pasteur qui, à l’exemple de son Maître et Seigneur, n’a cessé de « sortir » pour aller à la rencontre des hommes et des femmes de ce temps.
Alain Thomasset, sj
Vice-recteur en charge des relations internationales